L’humeur devant les dits et les faits,
l’effort de raisonner le quotidien.
Les
commentaires du bloguemestre
au
fil de l’actualité
n Le billet du 31 mars 2016 [1].
LES LONGS MURS DU TEMPS.
« La cour d'appel de
Paris rejette la demande de libération conditionnelle de Patrick Henry, 63 ans,
condamné à la réclusion à perpétuité en 1977 pour le meurtre d'un enfant ».
Horreur d'un crime commis il y a 40 ans mais qui
ne s'est pas effacé des mémoires.
Mais aussi un "détenu modèle", un
parcours d'études réussi. Ensuite, et malgré cela, des difficultés flagrantes
de réinsertion - les vols à l'étalage et le trafic de cannabis.
Avec cette question : des délits de cette nature
ont-ils légitimement, et du point de vue du simple bon sens, à peser vis à vis
d'une libération accordée dans le cadre d'une condamnation à perpétuité pour l’assassinat
d'un enfant ? Aucun lien factuel (grâce
au ciel), aucun rapport de gravité : ne reste que la conséquence judiciaire qui est celle d'un interminable
enfermement en prison pour l'intéressé.
Interminable au point qu'on doit se demander si
une incarcération dont la durée additionne aujourd'hui autant d'années ne
constitue pas en elle-même un acte de
cruauté incompatible avec les principes fondamentaux de notre droit et avec les
valeurs d'une société démocratique.
Oui, la question des longues peines, et d'abord
des très longues peines, doit se poser. On a renoncé au supplice de la roue, on
a aboli la guillotine, et ce fut à chaque fois un progrès de civilisation : le
moment n'est-il pas arrivé, en même temps qu'on s'attaquerait en profondeur à
la problématique de la réinsertion pour tous les condamnés, de limiter le
quantum des peines prévues par le code pénal, et à l'instar de la Norvège, d'en "bloquer" le maximum à 20
ans ?
Didier Lévy
[1] Publié sur Facebook ce même jour.
¨ UNE RÉACTION À LARTICLE DE Céline RASTELLO
sur TEMPSREEL.NOUVELOBS.COM
Publié
le 31 mars 2016
‘’La cour d'appel
de Paris rejette la demande de libération conditionnelle de Patrick Henry, 63
ans, condamné à la réclusion à perpétuité en 1977 pour le meurtre d'un enfant.
« C'est non », a rapporté Carine Delaby-Faure
à la sortie de l'audience, tenue à huis clos. La cour d'appel de Paris a rejeté
jeudi 31 mars la nouvelle demande de libération conditionnelle -la quatrième
depuis sa réincarcération- de son client Patrick Henry. En janvier dernier, le
tribunal d'application des peines de Melun (Seine-et-Marne) l'avait acceptée.
Mais le parquet avait fait appel. En début d'après-midi, face à la presse,
l'avocate s'est dite "terrassée" par cette décision.
« C'est une
énorme déception pour lui, pour moi, et pour la justice qui fait preuve d'une
absence totale d'humanité. ». Et d'annoncer, dans la foulée, son intention
de se pourvoir sans tarder en cassation.
‘’Détenu durant près de 40 ans, Patrick Henry, 63 ans
aujourd'hui, a été condamné en 1977 à la réclusion criminelle à perpétuité pour
le meurtre du petit Philippe Bertrand, 7 ans, qu'il avait enlevé un an plus tôt
un an plus tôt à Troyes (Aube), puis tué après avoir exigé une rançon de sa
famille. La France entière était en émoi. On l'avait appelé "l'ennemi
public numéro un". A la télévision, alors que l'enfant était déjà mort, il
avait dit avoir "mal au cœur pour les parents et pour le petit
garçon". Le présentateur de TF1 Roger Gicquel avait parlé de
"cynisme" et lâché sa phrase : "la France a peur". Patrick Henry avait échappé de justesse à
la peine de mort, notamment grâce à la plaidoirie de son avocat d'alors, Robert
Badinter.
Libéré en 2001, arrêté en 2002
‘’Après 25 ans de prison, en mai 2001, le détenu
modèle devenu informaticien, qui a lu et étudié en prison, validé plusieurs
diplômes, avait obtenu une libération conditionnelle. Qui n'avait pas duré. En
juin 2002, il est arrêté pour vol à l'étalage. Rebelote en octobre de la même
année, en Espagne, en possession, cette fois, de près de dix kilos de cannabis.
Retour en prison. En juillet 2014, la grâce présidentielle lui avait été
refusée.
‘’Le 7 janvier dernier, celui qui est
actuellement détenu à Melun avait convaincu les magistrats qu'il avait su tirer
les leçons de l'échec de sa réinsertion au début des années 2000. Le tribunal lui avait accordé cette
libération, soumise à la réussite d'un parcours de probation : permissions
de sortie sur trois mois, six mois dans un centre de semi-liberté à Lille puis
dix mois sous bracelet électronique, ainsi que sept ans de suivi. Mais le parquet avait fait appel, estimant
son accompagnement trop peu "encadrant". « Plus cadrant, c'est
la prison », s'était indignée son avocate. Fin février, Carine
Delaby-Faure avait de nouveau plaidé devant la cour d'appel de Paris lors d'une
nouvelle audience.
‘’Patrick Henry
"n'a pas démontré une volonté sincère et efficiente de réinsertion",
a argué la cour, selon son avocate. « Non sens », répond-elle, « depuis
que Patrick Henry est réincarcéré, il s'est constamment mobilisé, n'a jamais
perdu pied, a continué à travailler, à donner des cours en détention, à se
former, à se soigner. ».
« Patrick
Henry demeure un symbole et la cour a
très clairement exprimé qu'elle ne souhaite pas libérer cet homme là. Je crains
que cette décision augure, s'il en est, des décisions ultérieures qui soient
toujours négatives. ».
Carine
Delaby-Faure fait également part de son espoir de voir émerger « un débat
serein sur le traitement des longues peines, une réflexion sur ce que l'on fait
de nos détenus en France ».
Céline Rastello