ET SI C’ÉTAIT LÀ LE PREMIER
SUJET DE L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DE 2017 ET DES ÉCHÉANCES ÉLECTORALES DU
PRINTEMPS PROCHAIN ?
A en croire les études d’opinion, la majorité des Français
rejettent les mesures choc du programme de M. Fillon. Un rejet qui réconforte
dans la mesure où il indique que nos concitoyens ne s’alignent toujours pas sur
le message qui est martelé aux Européens depuis pas loin de quatre
décennies : « There is no alternative ». Mais qu'en
sera-t-il si notre système plébiscitaire fait que le second tour de la présidentielle
de 2017 oppose M. Fillon à Mme Le Pen ? Rejet ou pas, le choix contraint sera
entre ces "mesures choc" et le risque de l'instauration d'un Etat
lepéniste.
¤ Un choix faussé par la violation permanente dont notre Constitution est l’objet …
Un choix contraint, mais d'abord un choix faussé par la violation permanente
dont notre Constitution est l’objet, une violation qui configure notre vie
politique pratiquement depuis le jour de la promulgation de la dite
constitution.
Ainsi M. Fillon qui se présente avec le projet de mettre en oeuvre
une régression sans précédent de la protection sociale et de l’égalité, et une
vision sociétale qui se revendique de l’ultra conservatisme, appuie-t-il ce
projet sur un ensemble de mesures (1) qui sont porteuses d’un vice
originel qui devrait d’emblée les invalider. Elles se heurtent en effet à
l’objection, insurmontable en droit, de l’absence de compétence
constitutionnelle qui invaliderait les initiatives de M. Fillon si celui-ci
était élu et entreprenait de les faire appliquer.
Avant même que ces mesures soient condamnées pour le dessein
qu’elles traduisent de démanteler le contrat social réécrit à la Libération et
de déchirer le pacte républicain qui l’avait jusqu’ici garanti, et avant qu’y
soit dénoncé le revirement réactionnaire et clérical dont elles menacent les
droits les plus récemment conquis, c’est cette question préalable de
l’incompétence présidentielle que la Constitution et la distribution des
pouvoirs qui y est fixée exigeraient de soulever à leur encontre.
Encore faudrait-il pour que cette question préalable devînt une
question citoyenne qu'on attachât au respect de la Loi fondamentale un tant
soit peu de l'importance qui lui est tout naturellement portée dans un état de
droit, et qui l’est dans tous les pays démocratiques autour de nous. Ce serait
alors quasiment l’intégralité du projet du candidat de la droite qui se
trouverait infirmé dans son énonciation.
Qu’on considère chacun des sujets sur lesquelles portent les
mesures du programme de M Fillon et un constat identique saute aux yeux :
pour attentivement et soigneusement qu’on cherche, il n’est pas un article, pas
un sous-article, pas un alinéa de la Constitution approuvée en 1958 par 80 %
des Français, qui vienne attribuer l’ombre, ni l’esquisse de l’esquisse, d’une
compétence au président de la République dans les domaines auxquels s’attaque
le projet du vainqueur des primaires de la droite.
Rien, absolument rien, dans la Constitution n’autorise le président
de la République à décider ou à impulser des décisions politiques dans les
matières où ce projet cible le modèle social qui fait corps avec la République,
ou dans celles où l’auteur de ce projet affiche une lecture restrictive de la
laïcité et de la séparation entre le culte catholique et l’Etat.
Durée du travail, sécurité sociale, codification du droit du
travail, droit syndical et droit des institutions représentatives du personnel,
protection des salariés contre les licenciements, ressources des fonctions
publiques, nombre et statut des fonctionnaires, ou encore état et capacité des
personnes, questions de bioéthique, et contenu des enseignements dispensés par
l’école publique … dans tous ces matières l’initiative appartient concurremment
au gouvernement, en la personne du Premier ministre, et au Parlement, et à eux
seuls.
Dans celles qui sont de nature législative, la décision relève du
vote du Parlement. Pour celles qui sont d’ordre réglementaire, et hors ce qui
peut être réservé à des délibérations en Conseil des ministres, elle entre dans
l’exercice des attributions du Premier ministre.
C’est bien d’une usurpation par le président de la République des
compétences dévolues d’une part au gouvernement - faut-il une fois encore
rappeler qu’aux termes de l’article 20 de la Constitution, ce dernier « détermine
et conduit la politique de la nation » ? - et à son chef, et
d’autre part au Parlement, que procède le scénario écrit par M Fillon pour sa
campagne électorale : « Votez pour moi, et j’appliquerai le
programme que je vous propose et sur lequel vous m’aurez investi de la fonction
présidentielle ». Usurpation anticipée et par avance avalisée par sa
pratique constante sous la Vème république
¤ L’usurpation présidentielle inaugurée par le fondateur de Vème
république a eu tout le temps de se banaliser …
N’accablons pas plus qu’il ne le faut candidat de la droite. Tous
les autres candidats ont présenté ou présenteront un programme entaché pour la
même raison d’inconstitutionnalité. M. Mélenchon faisant exception dans la
mesure où son projet repose sur un retour aux sources de l’esprit républicain
via la conception d’une nouvelle constitution, et où sa candidature se
distingue par ce qui en fait d’abord une invitation adressée au peuple français
de lui donner mandat de conduire un changement de régime politique.
Si tous les autres candidats sont conduits à afficher la même
méconnaissance de la délimitation constitutionnelle des attributions du
président de la République, comme l’ont fait tous leurs devanciers et par
conséquent tous les présidents élus, c’est que l’usurpation présidentielle
inaugurée par le fondateur de Vème république a eu tout le temps de se
banaliser - un temps qui a été seulement suspendu par le retour au respect des
textes et des règles auquel ont obligé les périodes de cohabitation.
Ce qui est devenu, dans l’esprit de nos concitoyens, la lecture
naturelle de la Constitution de 1958 et la configuration normale de la fonction présidentielle se
confond avec l’idée que le général de Gaulle se faisait de l’une et de l’autre :
ayant dû, dans les institutions en préparation, concéder une empreinte
parlementaire très accusée, et a priori dominante, aux chefs des partis de la
IV ème république qu’il avait appelé à ses côtés dans le dernier ministère de
cette république, celui-ci imposa dès la mise en place du nouveau régime sa
conception personnelle du rôle du chef de l’Etat, et d’abord sa représentation
de ce chef. Une conception et une représentation qui allaient gouverner sans
partage à partir de la nomination de Georges Pompidou comme Premier ministre.
La vision monarcho-présidentialiste portée
par Charles de Gaulle eut en la personne de ce dernier un pédagogue hors
pair : à titre d’exemples, son affirmation de ce qu’il ne saurait y
avoir de dyarchie à la tête de l’Etat (ce qui n’était au demeurant
aucunement le problème posé s’agissant du respect de la Constitution), ou sa
gouailleuse interpellation à l’adresse de ceux qui auraient pu s’imaginer qu’il
était revenu au pouvoir pour inaugurer les chrysanthèmes ou le Salon de l’Auto,
ont contribué à asseoir au fil de son règne une conviction majoritaire en
faveur de la normalité du fonctionnement des institutions.
Et à qui soutenait que ce fonctionnement
penchait tout au contraire du côté du ‘’coup d’état permanent’’ pour ce qui
était des attributions accaparées par le président de la République, la
doctrine gaulliste opposait l’étrange argument qu’un ‘’esprit de la
Constitution’’ engendré par la forme plébiscitaire de légitimation qui
s’attachait au chef de l’Etat avait prévalu sur la lettre de la Loi
fondamentale, et jusqu’au point d’abolir la répartition des compétences
délimitée par celle-ci.
Après le départ du général de Gaulle, cet
‘’esprit de la Constitution’’ - fortifié par le souvenir conservé et magnifié
de l’exercice gaullien du pouvoir - a continué à régir la vie de nos
institutions et à régler notre vie publique par rapport à celles-ci. Et pour la
Vème république, les premières élections présidentielles tenues hors de l’ombre
portée de son fondateur ont été, par consensus ou tacite
acceptation/résignation, la confirmation de sa dénaturation en
césaro-présidentialisme - constat valant ensuite de 1981 à 2012.
¤ Concourir pour un mandat ramené aux
compétences constitutionnelles du président : une intention partagée par toutes
les gauches ?
La dégradation morale et l’affaiblissement
de la gouvernance qui ont respectivement marqué les deux derniers mandats
présidentiels, donnent à nos concitoyens - pour la première fois depuis le
référendum de 1962, ou depuis la confrontation du second tour de l’élection
présidentielle de 1969 - la matière d’un ré examen de l’acceptabilité qu’ils
ont accordée aux captations de compétences qui ont transféré l’exercice du
pouvoir exécutif au président de la République.
Un réexamen dont la conclusion est déjà
tirée dans le programme de M. Mélenchon auquel l’élaboration d’une nouvelle
constitution authentiquement républicaine sert de socle. Lucide et méritoire
intention, mais dont aucun démocrate cohérent avec lui-même ne peut concevoir
qu’elle ne soit pas commune à tous les candidats se réclamant de près ou de
loin de la gauche.
Cependant, cette intention serait-elle
partagée et affichée comme telle par ces candidats, le nombre de ceux-ci, et la
dispersion de voix qui en résultera, excluent presque à coup sûr qu’aucun
d’entre eux accède au second tour de l’élection présidentielle de 2017. Ce qui
destine tout projet de révision constitutionnelle, collectif ou distinct,
proposé de leur part au corps électoral à être rangé dans les rayons des
ouvrages de théorie politique. Aux fins de conservation en attendant
d’hypothétiques circonstances plus favorables à sa réalisation.
La défaite ainsi annoncée, ou l’échec trop
prévisible, sont la conséquence simplement arithmétique de l’existence de trois
gauches concurrentes. Entre celle qui se réclame du socialisme ‘’canal
philosophique’’, celle qui perpétue l’orientation sociale-démocrate et celle
qui assimile le social libéralisme à la modernité, les antagonismes
idéologiques ne sont présentement pas susceptibles d’être dépassés dans la
conception d’un programme commun de gouvernement et ferment la porte à
une candidature présidentielle unique.
Sauf toutefois si toutes les gauches
s’accordaient sur la désignation d’un candidat qui serait appelé à se présenter
devant les Français en portant exclusivement le projet d’obtenir leur confiance
pour exercer la fonction de président de la République - telle que celle-ci est
définie et encadrée par les disposition de la Constitution de 1958.
La cohérence ainsi mise en avant devant
les électeurs, jamais rencontrée jusqu’ici sous la Vème république, entre la
raison d’être d’une candidature présidentielle, i.e. l’intention
politique qui dirige celle-ci, et la nature du mandat pour lequel cette
candidature s’est déclarée - mandat circonscrit par le champ des compétences
assignées au premier magistrat de la République -, peut sembler sortir d’un
rêve républicain inaccessible. Ou paraître avoir été imaginée pour la
satisfaction d’un juridisme étranger aux réalités.
Cette cohérence est pourtant ce sur quoi
s’alignent, et apparemment sans même avoir besoin d’y prêter attention, toutes
les républiques de l’Europe démocratiquement avancée (Islande incluse) où
l’élection du président de la République procède du suffrage universel direct.
Ce qui souligne une exception française qui, en l’espèce, se confond avec une
arriération politique. Une arriération stupéfiante dans le pays de l’espace
européen dont l’Histoire moderne est la plus symboliquement liée à une Révolution
républicaine, elle-même porteuse de la proclamation d’une sacralité
constitutionnelle indépassable et, partant, absolue.
Quant au débat politique entre les trois
gauches, il serait renvoyé à ce qui en est institutionnellement le lieu :
les élections législatives appelées à suivre l’élection présidentielle. Car les dispositions de la Constitution
qui attribuent au gouvernement la détermination et la conduite de la politique
de la nation font qu’il appartient aux citoyens convoqués pour décider de la
majorité parlementaire qui légifèrera durant la prochaine législature, et dont
seront issus le Premier ministre et son équipe ministérielle, d’arbitrer à
gauche entre les plates-formes électorales de MM. Vals ou Montebourg ou Hamon,
et celles présentées respectivement par M. Macron et par M. Mélenchon.
Concrètement, cela signifierait que
l’engagement et la force de conviction que mobilisent aujourd’hui les candidats
à l’élection présidentielle, ou les candidats à la candidature à cette
élection, qui incarnent ou aspirent à incarner les idées propres à chacun des
trois courants entre lesquels l’électorat de la gauche se répartit,
s’investiraient dans la bataille des élections législatives.
Dans la campagne pour ces élections, les
trois chefs de file des composantes de la gauche concourraient ainsi, non pour
la fonction de président de la République, parce que ce n’est pas celle dans
laquelle la Loi fondamentale leur confèrerait les pouvoirs les habilitant à
mettre en oeuvre leur programme, mais pour celle de chef du gouvernement
disposant des attributions fixées par les articles 20 et 21 de cette même Loi
fondamentale … ou, en cas de défaite devant le corps électoral, pour celle de
chef de l’opposition.
Une défaite dont au demeurant cette
compétition interne au camp de la gauche, entre les visions politiques sur
lesquelles les gauches se différencient, n’aggraverait pas le risque dès lors
qu’au second tour du scrutin législatif, prévaudrait la règle du désistement en
faveur du candidat le mieux placé. Règle à laquelle reviendrait donc le rôle de
juge de paix entre les familles de la gauche pour l’établissement, sur la base
du nombre de sièges obtenus, du rapport de leurs forces dans la séquence
postélectorale.
¤ Prévenir
toute nouvelle usurpation du pouvoir exécutif par le président de la République.
Resterait au candidat investi par les
gauches pour l’élection à la présidence de la République à s’engager face au
suffrage universel sur les actes dont, s’il était élu, il prendrait
l’initiative pour prévenir - au titre de la mission qui lui incombe de veiller
au respect de la Constitution - toute nouvelle usurpation du pouvoir exécutif
par le président de la République, toute récidive de la captation de
compétences à laquelle son élection aurait mis fin.
Cet engagement passerait le plus
naturellement par l’annonce d’un référendum dans le cadre de l’article 11 de la
Constitution qui permet au président de la République de soumettre aux Français
« tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics ».
La consultation directe du peuple aurait
pour objet d’interroger celui-ci sur l’étendue des protections additionnelles
que requiert le régime républicain pour se prémunir contre des violations de la
Constitution visant dans l’avenir à une restauration du présidentialisme
plébiscitaire.
Le passage par cet article 11 pour réviser
la Loi fondamentale a rencontré les plus vives critiques, notamment de la part
de la très grande majorité des juristes, lors du recours qui y a été fait dans
ce but par le général de Gaulle en 1962. La question a été tranchée dans le
sens de l’interprétation de ce dernier à partir du moment où le corps électoral
s’est prononcé en faveur de l’élection au suffrage universel direct du
président de la République sur laquelle il était consulté selon cette procédure
- finalement plus habile qu’hasardeuse …
La sécurisation maximale du mode
républicain de gouvernement et la sanctuarisation corrélative du régime
parlementaire, dont, dans sa forme initiale, la Constitution de 1958 -
confrontée, il est vrai, à la personnalité écrasante de l’ancien chef de la
France Libre - a montré qu’elle ne possédait pas les sauvegardes nécessaires
pour les garantir, impliqueraient très probablement que l’interrogation des
Français soit plurielle.
C’est bien parce que sa candidature aurait
nécessairement engagé, au delà du rétablissement de la légalité
constitutionnelle, la réhabilitation du modèle parlementaire républicain, qu’un
président issu de toutes les gauches n’irait vraiment au bout de sa mission
qu’en soumettant plusieurs options au suffrage universel : plus précisément trois options qui se
distinguent par le degré ascendant de protection qu’elles offrent contre le
retour à un pouvoir personnel à caractère monarchique.
► La première solution consisterait
à conserver la Constitution de 1958 en y apportant les amendements indispensables
pour empêcher toute espèce de résurgence de la théorie qui a soutenu
l’existence d’un ‘’domaine réservé’’ au président de la République. Par
exemple, en substituant à l’énoncé « Le président de la République
négocie et ratifie les traités », celui de « Le
président de la République signe et ratifie les traités. Ceux-ci sont négociés
en son nom ».
Et d’une façon plus générale, pour y inclure les modifications de nature
à verrouiller la fonction présidentielle dans les missions d’arbitre et de garant
que le texte de 1958 lui a attachées. Dans la plupart des cas, à peine plus
que des nuances de rédaction suffiraient pour concentrer le rôle du président
sur ces missions - ce qui ne diminuerait pas l’importance de ce rôle puisque
toutes deux sont d’une portée capitale pour la nation et pour la République.
Encore faudrait-il asseoir les dites fonctions d’arbitre et de garant sur la
consécration institutionnelle de la neutralité du président de la République -
dont il devrait être expressément spécifié qu’il est placé au-dessus des partis
politiques et indépendant de ceux-ci - et sur la responsabilité qui lui revient
de veiller à l’impartialité de l’Etat.
La fortification, en parallèle, des
attributions du gouvernement appellerait, elle, le renfort d’amendements qui
affirmeraient de la façon la plus catégorique que les articles 20 et 21 de la
Constitution sont insusceptibles d’interprétations restrictives. Il
conviendrait ainsi, fût-ce au prix de deux redondances successives, de
compléter le texte de ces deux articles en écrivant, pour le premier, que ‘’le
gouvernement détermine et conduit la politique de la nation et exerce à ce
titre le pouvoir exécutif de la République dans toute l’étendue de celui-ci’’,
et pour le second, que ‘’le Premier
ministre dirige l’action du gouvernement et est à ce titre le chef du pouvoir
exécutif de la République française’’.
Sans préjudice, bien entendu, de la chasse
plus extensive qu’il y aurait lieu de faire, au fil des articles, à toute
disposition capable de seconder une dérive du pouvoir présidentiel hors des
limites que la constitution assigne à celui-ci, ou offrant une quelconque
matière pour arguer d’une équivoque ou d’une obscurité au préjudice de
l’intégrité de la fonction primo ministérielle.
► La deuxième option
découlerait de ce constat que même appliquée en conformité avec le mode de gouvernance
parlementariste qu’elle prévoyait au départ, la Constitution de 1958 resterait porteuse d’un caractère orléaniste
foncièrement incompatible avec le référentiel républicain. Incompatibilité
aggravée par l’autre attraction qu’elle subit, celle du bonapartisme qui émane
de l’usage plébiscitaire que le premier président de la Vème république a fait
du référendum et de l’hyper personnalisation du pouvoir qu’il a provoquée en
faisant adopter l’élection au suffrage universel direct du premier magistrat de
la République. Un bonapartisme louis-napoléonien dont la République, légataire
de Victor Hugo, s’est toujours voulue l’irréductible adversaire.
Pour s’en tenir à son essence orléaniste,
et quels que soient en fin de compte les amendements de précaution qu’on y
introduirait, la Constitution de 1958 renvoie à la Monarchie de Juillet. Et
cette filiation en appelle à l’histoire pour remettre en mémoire qu’en France,
la monarchie constitutionnelle n’évolue pas naturellement vers la monarchie
parlementaire, la représentation « (d)’un roi qui règne mais ne
gouverne pas » n’ayant ainsi pas pu prévaloir quant elle est venue en
débat sous le régime de la Charte de 1830 (le Second Empire finissant aurait
peut-être apporté la preuve contraire si le désastre de Sedan n’avait pas
balayé un régime qui évoluait vers un bonapartisme parlementarisé).
Un
constat qui inclinerait à opter en faveur d’une nouvelle constitution
strictement alignée sur le modèle-type des républiques parlementaires. Modèle dont la meilleure illustration
autour de nous est probablement offerte par la constitution allemande - réserve
faite de la non transposabilité de sa construction fédérale.
Et très exemplairement offerte si l’on
considère plus particulièrement son mode de mise en jeu de la responsabilité
gouvernementale par la procédure de la motion de censure dite ‘’constructive’’
- aussi irréprochable du point de vue démocratique que pertinente en tant que
facteur de stabilité de l’exécutif.
► La troisième option procéderait d’un autre constat : celui de l’essence monarchique dont la fonction de président de la République a été investie par le vote, en 1873, de
la loi du Septennat qui a
établi l’irresponsabilité politique de son titulaire.
Certes les républicains ont par la suite
retiré l’essentiel du pouvoir exécutif des mains du président de la République
au profit de celles des ministres responsables devant les Chambres (la
politique étrangère demeurant toutefois dans l’apanage des présidents
successifs jusqu’à la fin de la Première guerre mondiale - c’est Georges
Clemenceau qui marqua la césure en la matière en négociant à peu près seul les
clauses du Traité de Versailles). Mais il est resté à la présidence de la
République d’avoir été initialement conformée, et largement au delà des
attributs symboliques dont on avait voulu qu’elle fût revêtue tel le droit de
grâce, comme la préfiguration d’un trône qui attendait la mort du comte de
Chambord pour être relevé.
Empreinte qui ne s’est jamais complètement
effacée sous les III ème et IV ème républiques, ne serai-ce que dans le
cérémonial, les représentations civiles et militaires ou les dotations diverses
- toutes pompes et prévenances pourtant considérablement plus modestes que ce
qu’elles devinrent sous la république suivante - appelés à souligner l’éminence
de la fonction présidentielle.
Si l’on regarde cette conformation
monarchique de la magistrature présidentielle non plus seulement dans sa
continuité historique mais en privilégiant son origine et son dernier avatar,
la similitude des effets est frappante entre la stratégie des partis royalistes
durant la préfiguration de la III ème république et le dessein institutionnel
du fondateur de la Vème république : au point que la comparaison entre
les pouvoirs attribués en 1875 au maréchal de Mac-Mahon en anticipant les
contours d’une fonction royale restaurée, et ceux que Charles de Gaulle a
confisqués entre 1959 et 1962 au bénéfice du chef de l’Etat qu’il entendait
être, ne fait finalement apparaître que des différences assez infimes et
globalement insignifiantes.
Tout
esprit républicain peut tirer des éléments de cette analyse la conséquence que
la disparition de la fonction de président de la République conforterait et
ressourcerait la République.
Le ralliement à cette suppression de la
magistrature présidentielle amènerait à proposer au suffrage universel une
architecture constitutionnelle dans laquelle le Premier ministre ajouterait à
ses attributions de chef du pouvoir exécutif la charge d’occuper la tête de
l’Etat. Ce cumul fonctionnel justifierait qu’il porte dorénavant le titre de
‘’Président du gouvernement de la République’’.
Cette
organisation réunissant sur une même personne la direction du gouvernement et
la représentation de l’Etat - son incarnation symbolique dans une acception républicaine - trouverait un précédent dans les
institutions transitoires mises en place après la Libération. Institutions
qui, sur ce schéma, ont régi la France en 1945-1946 pendant les mandats des deux Assemblées
constituantes, les fonctions de ‘’Président du Gouvernement Provisoire de la
République’’ étant successivement exercées par le général de Gaulle, Félix
Gouin, Georges Bidault et Léon Blum.
L’inscription de cette présidence du
gouvernement de la République dans une constitution scrupuleusement
conforme aux principes et aux normes dans lesquelles se reconnaissent les
républiques parlementaires, marquerait que la République française se dote de
la forme institutionnelle la plus épurée que ces républiques puissent revêtir.
¤ Des projets dont le tronc
commun satisferait aux impératifs auxquels toute réhabilitation républicaine a
l’obligation de répondre.
Le départage entre les trois options
constitutionnelles dessinées ci-dessus qu’il reviendrait au corps électoral
d’effectuer, ne saurait intervenir qu’entre des projets dont le tronc commun
satisferait aux impératifs auxquels toute réhabilitation républicaine a
l’obligation de répondre.
Pour s’en tenir concernant ces impératifs
aux priorités qui semblent s’imposer, une
table des matières en sept points peut être dressée :
- rédiger et placer en tête de la
Constitution une nouvelle déclaration
des droits, reprenant et développant celle, inspirée du programme du CNR,
qui accompagnait le projet constitutionnel du 19
avril 1946
(projet rejeté par référendum). Une déclaration sanctuarisant d’une part le
modèle social inséré à la Libération dans le contrat républicain, et d’autre
part tous les droits nouveaux acquis par les femmes depuis les années 1960, ou
ayant consacré des avancées sociétales (l’abolition de la peine de mort en
premier lieu) et/ou fortifié l’égalité des personnes (au bénéfice notamment des
homosexuel(le)s).
- instaurer un pouvoir judiciaire en lieu et place de l’autorité
judiciaire, et garantir la pleine indépendance de tous ses membres.
- consacrer le rôle du Conseil constitutionnel par sa
transformation en une véritable ‘’Cour
constitutionnelle’’.
- adopter la
représentation proportionnelle pour toutes les élections, en y incluant une
prime majoritaire, calibrée et ajustée au
plus juste, quand l’élection en cause détermine la désignation d’une autorité
exécutive. Et pour les scrutins qui par vocation sont de nature uninominale,
s’affranchir de la religion de la majorité absolue, qui est portée à réduire et
à dénaturer le choix démocratique, en reconnaissant l’entière légitimité de la
volonté citoyenne exprimée à la majorité simple. Laquelle est un bon antidote
au poison plébiscitaire.
- réduire à 4 ans la
durée de tous les mandats électifs (hors le
Sénat où un renouvellement par moitié tous les 3 ans semble convenir pour une
chambre de réflexion), et limiter à 3 le nombre des mandats exécutifs locaux
consécutifs.
- démocratiser le
Sénat, et
élargir parallèlement sa représentation des territoires à celle des forces
économiques, sociales et associatives (écologiques en particulier) -
élargissement entraînant sa fusion avec le CESE, mais distinguant entre les
voix délibératives des sénateurs territoriaux et celles, consultatives, des
représentants économiques, sociaux et associatifs.
- aligner les règles qui encadrent le fonctionnement des deux
assemblées sur celles appliquées dans les autres parlements européens, et ce
dans la mesure - i.e. exclusivement dans la mesure - où la comparaison
avec ceux-ci manifesterait des distorsions nuisibles à l’exercice dans notre
pays du pouvoir législatif et du pouvoir de contrôle des représentants de la
nation.
Alignement qui ne saurait cependant en aucune manière porter
atteinte au noyau le plus substantiel du parlementarisme rationnalisé qui a été l’œuvre de Michel Debré et son apport majeur dans
la conception de la Constitution de 1958. Ce n’est là rien moins que le pilier
sur lequel reposent, au moins pour leur part principale, la capacité d’agir des
gouvernements, quelle que soit la marge majoritaire qui leur est acquise, et
l’assurance dont ils disposent quant à la durée sur laquelle leur politique
peut se déployer.
Fasse avant tout à cet égard que
les génies protecteurs de la République dissipent enfin les ténèbres qui
entourent le fameux alinéa 3 de l’article 49 de la Constitution. Et qu’ils
libèrent de leur a priori les censeurs de ce ‘’49-3’’ qui, à gauche
principalement, exposent son dispositif au pilori des lois scélérates et ne
sont pas loin d’assimiler sa mise en oeuvre à un coup d’Etat.
La réhabilitation républicaine, qui serait l’ambition
attachée aux trois projets constitutionnels concurremment présentés aux
Français, ne pourrait en effet se priver de l’assise que l’article 49-3, dans
sa rédaction originelle, apporte à la stabilité et à la continuité de l’action
de l’exécutif. Sauf pour les matières
touchant aux libertés publiques, aux droits de la personne et aux questions qui
relèvent des choix de conscience des élus - ce qu’on désigne couramment par les
‘’questions de société’’, il est nécessaire, et légitime, qu’en démocratie
parlementaire, et pour autant que les droits et prérogatives des assemblées se
tiennent au niveau où ils doivent être, un gouvernement soit toujours à même de
mettre la représentation nationale devant ses responsabilités : c’est à
dire devant l’alternative de le laisser agir ou d’ouvrir une crise que le
suffrage universel aura à trancher.
La logique qui préside à
l’application du ‘’49-3’’ s’accorde au demeurant avec la nature même du régime
parlementaire. A la différence du régime présidentiel, décalqué de la monarchie
constitutionnelle d’antan, où le sacre électoral confère le pouvoir pour une
durée de mandat en principe garantie, le système parlementaire expose les
gouvernants à se voir retirer à tout moment la confiance qui les a investis.
L’alinéa si conteste, et si incompris, constitue le contrepoids naturel à la
remise en cause qu’une majorité est en capacité de diriger contre l’exécutif
sur tel aspect de sa politique : un contrepoids que valide ce principe
constitutif du parlementarisme, et de la légitimité qui y prime, suivant lequel
en
démocratie on gouverne, non parce qu’on a une majorité derrière soi,
mais parce qu’on n’a pas une majorité contre soi.
L’intelligence politique commande en outre de se
remettre en tête que le dispositif de l’article 49-3 est fait pour soutenir des
majorités parlementaires simplement relatives, ou incertaines, et que comme
tel, ce sont essentiellement des gouvernements de gauche qu’il a confortés -
notamment, et avant celui de Manuel Vals, le gouvernement de Michel Rocard
entre 1988 et 1991.
► ► n ◄ ◄
Le plaidoyer qu’on a développé pour que
l’élection présidentielle de 2017 soit abordée à gauche en posant devant le
corps électoral la question de la Constitution - sous les deux angles de la
transgression continue qui a été infligée à ses principales dispositions et de
la rénovation républicaine que commande la dégradation de notre démocratie et
les fractures grandissantes de la société - constitue aussi l’expression d’un
remords qui devrait habiter toutes les familles composant ‘’les gauches’’.
◙ Le
remords pour tous ceux qui avaient rejeté la réforme constitutionnelle de 1962
modifiant le mode d’élection du président de la République - en prévoyant la
dérive césariste et, à terme, la stimulation des poujadismes qui en seraient la
conséquence -, d’avoir progressivement délaissé le combat sur le terrain
institutionnel. Délaissement déjà sensible à la présidentielle de 1965, et qui,
à partir de 1974, a de plus en plus exclusivement centrée l’engagement
électoral sur la promotion du programme du ou des candidats de gauche.
Certes, notre génération garde imprimée en
elle l’émotion intense qui l’a saisie quand sur un écran où se traçait le
visage (qui fut pendant de longues secondes difficilement identifiable) du
vainqueur du second tour de 1981, la voix de Jean-Pierre Elkabbach a annoncé
que « François Mitterrand (était) élu président de la République ».
Séquence télévisée maintes fois revue parce qu’elle appartient à l’Histoire.
Demeure que Pierre Mendès France disparu,
quasiment plus aucune voix de gauche n’a fait clairement entendre la
dénonciation du Commandeur visant des institutions d’esprit monarchique et la
confusion des fonctions auxquelles celles-ci donnaient lieu au profit d’un
président issu d’un vote plébiscitaire.
Responsables
politiques, médias, juristes et citoyens se sont accommodés pendant un
demi-siècle de ces deux vices attachés à la V ème république qui
du point de vue républicain, auraient dû discréditer le système politique que
celle-ci avait installé.
Cet accommodement s’est composé de
l’habitude acquise d’un mode de vie publique dominé par la personnalisation du
pouvoir, et de l’adhésion ou de la résignation des acteurs et des observateurs
de cette vie publique à un état de fait regardé comme non révisable.
◙ Ce sont les circonstances de l’élection
présidentielle de 2002 qui sont venues ébranler les bases de ce consentement ou
de ce renoncement, et
probablement bien davantage que cela n’a été perçu à l’époque ni depuis. Pour
la première fois, le second tour n’opposait plus des candidats défendant des
programmes de gouvernement alternatifs, mais mettait tous les républicains en
demeure de mêler leurs suffrages pour rejeter un candidat dont la personne
n’était faite que d’une négation absolue de la République, de ses valeurs et de
ses principes. La suite de ce rassemblement victorieux des républicains de
droite et de gauche aurait dû être de placer le président élu au dessus des
partis des deux bords, c’est-à-dire de renouer avec la fonction présidentielle
définie par la Constitution de 1958.
On sait qu’il n’en a rien été. Et il ne
pouvait pas rester sans dommages sur le processus plébiscitaire pour lequel le
second tour de l’élection présidentielle a été imaginé, que celui-ci se fût
conclu en 2002 sans mettre en concurrence deux projets politiques personnalisés,
et que son dénouement eût été tranché par l’élection du candidat commun de la
droite et de la gauche. Le tour de passe-passe par lequel ce candidat commun est
redevenu ensuite, le résultat obtenu, le chef d’une majorité présidentielle
réduite à la droite seule, n’ayant réussi qu’à renouer artificiellement avec la
logique et l’esprit du plébiscite post gaullien.
◙ Si le
scrutin de 2002 a porté atteinte à la cohérence interne du rituel de l’élection
du président de la République, le
scrutin suivant a paru prendre en compte tous les paramètres définis dans la
révision constitutionnelle de 1962 et mis en valeur par les exégèses
favorables qui n’ont cessé de la prolonger. En 2007, le scénario proposé au
suffrage universel alliait bien l’affichage d’un projet politique aux deux
candidatures en compétition au second tour, et faisait incarner ces
candidatures par deux personnalités exemplairement conformées au choix
plébiscitaire auquel les citoyens étaient conviés. L’économie monarchique de
l’élection - hors la vocation arbitrale originelle de la fonction à pourvoir -
et la prétention démocratique de l’appel au peuple voulu par Charles de Gaulle
étaient de plus également satisfaites.
◙ Ce fut là une relégitimation césariste
sans lendemain. Le mandat inauguré en 2007 et le mandat suivant ont été, après
l’élection présidentielle de 2002, d’autres étapes d’une décrédibilisation du
présidentialisme de la V ème république. Le premier pour l’indignité de son titulaire, le second pour
la disqualification permanente dont en termes de compétence, de gouvernance et
de résultats, son exercice a été l’objet.
L’improbité qui a sévi entre 2007 et 2012
n‘appelle pas de développement autre que la formulation du vœu citoyen de voir
la justice, aidée si nécessaire par le journalisme d’enquêtes, voire par
d’autres concours du type de ceux qui émanent de ‘’lanceurs d’alerte’’,
éclaircir sans autres délais la somme des affaires en cause et réprimer les
crimes - plus spécialement de forfaiture - et les délits qu’elle aura établis.
Pour le mandat qui a commencé à courir en
2012, l’important n’est pas tant dans la disqualification dont il a été frappé
dès ses commencements - une disqualification du président dans laquelle se sont
conjugués ses décisions prises contre son camp, ses louvoiements et revirements
qui ont fait plus que désorienter les citoyens, et les réquisitoires outrés
incessamment nourris à son encontre par les partis de droite et par les médias.
Il réside dans l’aperçu global qui s’en dégage : celui de fonctions
honorablement tenues dans tous les domaines où la Constitution de 1958 a donné
au président de la République compétence pour agir, et dans tous les autres,
ceux où les présidents de la V ème république ont perpétué la captation de
pouvoirs opérée par le général de Gaulle, un bilan qui n’est fait en majorité
que d’échecs plus ou moins retentissants.
Ce départage, dans le mandat qui se
termine, entre mérites et faiblesses laissant entendre que l’irresponsabilité
politique du président de la République peut comporter des inconvénients ou des
risques limités, et même trouver une certaine raison d’être, quand elle
recouvre les attributions présidentielles afférentes à la charge de garant des
intérêts fondamentaux de la nation. Mais
qu’elle entrave le jeu normal de la démocratie si elle s’étend à des actes
touchant à la gestion ordinaire des affaires publiques, laquelle ne s’envisage
pas, dans une forme moderne de gouvernement, sans que l’exécutif soit
susceptible à tout instant d’être sanctionné pour ses défaillances ou ses
insuccès. Pour la gravité de ses défaillances ou la poids accumulé de ses
insuccès.
Ce survol des quinze dernières années du présidentialisme à la
française, et l’analyse qui en ressort du déclin dans lequel s’enfonce le
système politique de la V ème république, ne
confirment-t-ils pas que les temps sont mûrs pour mettre le sujet de la
constitution au cœur de la campagne présidentielle ?
Un sujet qui y a par nature sa place. Pour
la raison (et là-dessus on se réclamera pour une fois du général de Gaulle)
que dans un état de droit, quels que soient les problèmes du moment, leur
nombre et leur gravité, la constitution est toujours l’essentiel.
Mais aujourd’hui les circonstances
imposent : parce qu’après cinq
décennies de contradictions et d’errance institutionnelles, l’évidence des unes
et de l’autre peut convaincre les Français qu’ils ont à se déterminer en
matière constitutionnelle à partir d’une interrogation qui est de l’ordre des questions-sources de la démocratie :
« Voulez-vous que le président de la
République que vous aller élire respecte le champ de compétence imparti par la
Constitution à l’exercice de son mandat et, dans l’affirmative, voulez-vous que
la constitution qui borne ses attributions soit celle de 1958 qui s’est montrée
désarmée devant l’usurpation de pouvoirs que tous ses prédécesseurs ont
commise, ou une nouvelle constitution qui garantisse pour l’avenir le caractère
républicain et parlementaire de nos institutions et de leur
fonctionnement ? ».
Question qu’il importe d’éclairer en la
confrontant au sens fondateur de l’adjectif ‘’républicain ‘’ - sens
qui aurait pleinement justifié qu’on écrive ci-avant ‘’républicain et donc parlementaire’’.
Et sens qu’on formulera ainsi :
‘’Etre
républicain, c’est porter dans toutes les fibres de son être une exécration
absolue et irréductible à l’égard de toute forme de pouvoir personnel’’.
Retenir cette définition, c’est également
interroger les citoyens sur le mode de désignation qu’elle entraîne s’agissant
du premier magistrat de la République. Et, dans l’hypothèse où ils opteraient
pour une architecture constitutionnelle qui réunirait sur une même personne la
direction du gouvernement et la représentation symbolique de l’Etat, pour
l’élection du ‘’Président du gouvernement de la République’’.
Faire
ainsi de l’élection présidentielle de 2017 le moment de décisions démocratiques
engageant la restauration de la république et la réhabilitation de l’esprit et
du projet républicains, n’est-ce pas conférer à ce scrutin la portée d’une
refondation civique et ouvrir la porte à l’indispensable réécriture de la
composante politique de notre contrat social ?
Ce qui nous éloignerait immensément des
compétions d’ego ou des calculs de carrière qui ‘’plombent’’ nombre des candidatures
ou pré-candidatures issues présentement des gauches, et nous situerait exactement
à l’opposé de la conformation plébiscitaire qui a dénaturé l’élection du
président de la République depuis la révision de 1962.
Didier
LEVY - 19 12 2016
‘’D’HUMEUR
ET DE RAISON’’
Publié sur Facebook ce même jour.
(1) Des mesures dont on
rappellera que les plus illustratives sont :
- d’augmenter la durée du
travail (de facto jusqu'au plafond des 48 h qui est la seule limite fixée dans
l'UE),
- de revenir sur les
garanties apportées par l'assurance-maladie, au profit de complémentaires-santé
privées qui corrèlent prise en charge des soins et niveau de ressources,
- de renvoyer massivement à
des accords d’entreprise les dispositions actuellement sécurisées par leur
insertion au code du travail,
- de réduire les
possibilités de représentation des salariés dans les entreprises,
- de donner au patronat les
moyens de contourner les oppositions syndicales en interrogeant directement les
salariés, autrement dit de marginaliser encore davantage les syndicats dans les
entreprises - et tout spécialement dans les PME (quand les syndicats sont
parvenus à s’y implanter),
- d’instaurer des formes de
contrat de travail qui pour l'employeur "sécurisent" les
licenciements individuels,
- de donner aux entreprises
la possibilité de procéder à des licenciements collectifs de façon quasi
discrétionnaire,
- d’accompagner ce
démantèlement des protections sociales par un délitement supplémentaire des
moyens de l’Etat, par une rétraction brutalement et dangereusement aggravée de
sa présence et de sa visibilité en tant que gardien et serviteur du bien
public, et par une dégradation clairement assumée de sa fonction de garant de
l’intérêt général face aux intérêts privés,
- de supprimer, pour les
thématiques sociétales, le droit à l'adoption plénière pour les couples
homosexuels,
- et de conforter la
discrimination des couples de femmes et des femmes seules en matière d'accès à
la PMA, tout en aggravant la prohibition du recours la GPA (en ciblant en
particulier le statut des enfants nés de celle-ci et ce, contrairement aux
droits qui leur sont reconnus au niveau européen).
Le reste étant à l'avenant - dont la réécriture
des manuels scolaires d’histoire pour les conformer à un roman national
identitariste voué à les référer à des ‘’racines chrétiennes’’ invoquées à
contresens).