« Ne
me touche pas car je ne suis pas encore monté vers mon Père »
ou plutôt « Cesse de me toucher ! »
POUR LE BLOGUE "GARRIGUES ET SENTIERS"
(le texte ci-dessous intègre quelques
amendements apportés à l’original).
En réponse à un article de
René Guyon : Cesse de me toucher !
Publié le 17 mai 2015 par
Garrigues et Sentiers -
Publié d’abord dans D'une
Alliance à l'autre
Une fois encore, avec votre
article « Cesse de me toucher ! »,
votre blogue offre une lecture passionnante et jubilatoire. Avec ce sentiment
d’avancer dans le chemin de l’intelligence de la foi en pénétrant au cœur du
texte et en suivant la libre recherche de l’auteur. Une recherche pénétrante
justement parce qu’elle libre, affranchie du carcan des interprétations figées
et confinées qui ont été dictées par la « ligne du parti », et qui
remonte à des sources souvent ignorées par le lecteur, ou inexplorées malgré
leur valeur de déchiffrement.
Et une recherche dont le
partage, pour mon expérience personnelle, apporte une sensation intérieure de
paix et de plénitude qui ressemble à celle ressentie devant un horizon qui soudain
se dégage
Au reste la foi est-elle séparable
de la quête de l’intelligence de la foi, et cette quête n’est-elle pas un
commandement pour qui reçoit la grâce de la foi ? En sachant que l’interrogation
de la foi à laquelle nous sommes appelés ne déchiffrera que ce que le projet de
la transcendance livre à la connaissance et à la compréhension des créatures
humaines à chaque temps de leur histoire, et pour la place que celui qui interroge
a vocation à tenir dans ce projet.
Mais peut-être
l’accomplissement du dévoilement des fins de la création, et de la raison
d’être du parcours de l’alpha à l’oméga, requiert-il d’une façon ou d’une
autre, sous une forme ou une autre de corrélation, que ceux qui partagent la
foi - et pourquoi pas également ceux qui
se tiennent au dehors d’elle - questionnent à chaque génération la Parole reçue
dans un passé millénaire, celle qu’ils n’entendront pas par eux-mêmes, et la
signification d’un Livre composite, détourné de transmissions en traductions, pétrifié
à force d’interprétations s’assujettissant à la lettre et non à l’esprit et
d’édifications de dogmes, et au total non déchiffrable sauf en proportion des lumières
dispensées par l’Esprit.
Ce « « Cesse de me toucher ! » m’a depuis
longtemps arrêté. Et sans trop imaginer avoir partagé le don de ces lumières,
je me risque à livrer le sens que j’y ai trouvé et qui éclaire ma perception de
la Résurrection.
« Ne me touche pas car je ne
suis pas encore monté vers mon Père » - dans la formulation qui m’a été
enseignée [j’ai tôt délaissé le ‘’Ne me retiens pas"] - se comprend comme une injonction d’un juif à
une juive, tous deux dans l’obéissance à la Loi. Injonction que l’on entend
dans une intonation affectueuse - le film est muet mais le sous-titrage compte
tenu de ce que l’on sait des rapports entre les personnages, impose l’idée de
cette tonalité (surexposée au reste par le ‘’Marie’’ prononcé auparavant par
Jésus, et par le ‘’Rabbouni’’ de Marie en réponse) - mais qui renvoie à
l’interdiction de tout contact physique entre un homme et une femme en état de niddah
- i.e. qui ‘’a’’ ses règles [1].
Interdiction qui vaut en
dehors des relations du couple et qui fait qu’un homme ne serrera ni ne
touchera la main d’une femme (fût-ce pour lui donner les clés de sa voiture)
s’il n’a pas la certitude que celle-ci n’est pas dans la période de ses règles.
La
notation de cette injonction ne vient-elle pas dans l’évangile de Jean pour signifier que si Jésus ressuscité
demeure soumis à la Loi - et à une prescription non pas déterminée à partir
d’une représentation d’impureté qui la déprécierait par son ancrage dans
l’archaïque des préjugés, mais tenue pour relever de la plus haute spiritualité
du judaïsme (ce qui exclut que sa mention dans le récit de la Résurrection soit
anecdotique !) -, c’est qu’il est encore un homme au moment de son
apparition à Marie de Magdala. Que c’est le Fils de l’Homme qui est vainqueur
de la mort, bien distinct du Fils de Dieu qu’il sera pleinement une fois
« monté vers (son) Père »
et réuni à lui dans l’unicité du divin ?
C’est là moins une
interprétation qu’une hypothèse qui est proposée, et non par un spécialiste du
judaïsme (je ne suis d’ailleurs pas juif) mais par un historien de formation
qui est porté à lire le récit évangélique en le replaçant dans le contexte juif
qui est celui de ses personnages.
Didier LEUWEN - 19 05 2015
Publié par "penserlasubversion" dans "collection LUMENA".
[1] La durée totale de l’abstention de
contacts physiques au sein du couple dictée par l’état de niddah - 7 jours
rajoutés à une période de 4/5 jours minimum correspondant à la dernière trace
de sang - laisse imaginer qu’en lien avec l’obligation religieuse de procréer,
le judaïsme a eu une connaissance précoce de la physiologie de la reproduction
humaine, au moins s’agissant de la phase du cycle féminin favorable à la
fécondation.
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