La lauréate de ce concours, désignée dans son établissement scolaire, a donc
décidé de prendre ce sujet.
Elle a 13 ans et est en classe de 4ème.
Dans ma descendance, elle m’est
particulièrement chère.
Mais je publie ci-dessous le texte
intégral de son discours parce que choisir à son âge d’exposer ce qu’on
pense ‘’des règles’’ devant le public de ses condisciples – filles et garçons – et de ses ‘’profs’’,
démontre une rare volonté d’affirmer ses convictions.
Quand vous aurez lu ce discours, et
en ayant bien gardé en tête que cette jeune et belle personne a fêté il y a peu
son treizième anniversaire, vous
vous direz que cette singulière volonté est secondée par maturité surprenante
et par une aptitude aussi rare à défendre ses idées – y compris vous le
verrez en interpellant les garçons, « les gars ».
Sans doute resterez-vous comme moi pantois devant sa détermination à s’attaquer
aux tabous, aux préjugés, et aux superstitions en tous genres que les
obscurantismes les plus puissants, les archaïsmes les plus malsains et les plus
malfaisants, et toutes les arriérations, les plus confinées dans la stupidité (ou
carrément perverses) et les plus indurées, dirigent depuis la nuit des temps,
et de nos jours, sur le sang menstruel - qui n’a rien, pourtant, que de naturel et banal.
Lisez, et dites-vous bien que le
combat mené par notre lauréate sur le thème des menstruations est tout sauf secondaire. Mais qu’il figure au premier rang parmi
ceux qui sont à livrer pour la dignité du féminin, pour la dignité et la
liberté du corps et du sexe des femmes.
Le bloguemestre
Didier
LEVY - 15 février 2018
‘’ Bonjour à tous, aujourd’hui je vais vous parler
d’un sujet considéré comme tabou par la quasi-totalité de la population
mondiale, un sujet dont personne ne parle, comme s’il n’existait pas : les
menstruations, ou règles. Oui, je suis en train de vous parler de ce sang
menstruel qui sort de notre corps une fois tous les mois.
Et maintenant, vous êtes surement en train de vous demander comment j’ai pu choisir ce
sujet, mais la vraie question, celle que je me pose, c’est plutôt : pourquoi
vous vous posez cette question ?
Les
menstruations sont quelque chose de très naturel, qui arrive à toutes les
femmes du monde depuis l’apparition de l’être humain et, est-ce nécessaire de
vous rappeler que c’est grâce à ce sang menstruel que vous êtes ici, en train
de m’écouter ? Que c’est grâce à ce sang que vous êtes nés ?
Depuis la nuit des temps, les règles
ont été considérées par l’homme, mais aussi par la femme, comme quelque chose
de sale, une honte qu’il faudrait cacher, qui dégoute.
Ce sang, et
la possibilité de pouvoir saigner tous les mois sans qu’il arrive quelque chose
de grave à la femme, ont été observés par l’homme avec peur, et c’est ainsi que
sont apparues les premières superstitions sur ce phénomène qui se produisait
tous les mois.
Dans la
tradition romaine, les menstruations avaient des effets merveilleux et
dangereux à la fois, et pouvaient soigner tous types de maladies.
Au Moyen-Age,
l’Église catholique disait que les menstruations étaient la punition imposée
par Dieu à toutes les femmes en raison du comportement d’Ève.
Et, jusqu’à
il n’y a pas très longtemps, les femmes avaient l’interdiction de prendre la
mer, de chasser, de voter, de parler en public et d’avoir des responsabilités
politiques et religieuses parce qu’il était dit qu’elles étaient instables
durant leur période de menstruations.
Bon, vous pourriez vous dire
qu’aujourd’hui les règles ne posent plus aucun problème dans notre société.
Mais vous vous trompez.
Encore maintenant, les règles sont classées dans
le top 10 des thèmes les plus tabou, car il existe ‘’un certain malaise’’ autour de ce sujet.
De plus, des
superstitions sur les menstruations persistent encore dans beaucoup de pays et
régions du monde, comme par exemple en Inde où l’on dit aux femmes que leur
sang peut contaminer des aliments, ou en Afghanistan, où on leur dit qu’elles
deviendront stériles si elles prennent des bains au moment de leurs règles.
En plus
d’être un sujet tabou, c’est un sujet autour duquel existent de nombreux
problèmes qui n’ont toujours pas été résolus, comme par exemple :
- l’accès aux protections hygiéniques : dans
le monde, énormément de femmes n’ont pas accès aux protections hygiéniques,
surtout dans les pays pauvres, à cause des prix trop élevés. Il faut savoir que
durant toute sa vie, une femme dépense 7 000€ dans l’achat de tampons et
serviettes hygiéniques.
- en plus d’être trop cher, une étude récente
démontre que dans chaque tampon il y a
plus de trente produits toxiques qui peuvent provoquer des maladies graves.
Et je ne vous parle pas de la
communication avec les hommes. Et quand je dis les hommes, je vous parle
de l’autre moitié de l’humanité, ces humains qui ont la chance de ne pas avoir
des fortes douleurs de ventre tous les mois.
La plupart ne
sait rien, ou presque, sur les règles, et quand on leur en parle ils se
moquent, rigolent ou changent de conversation. Mais vous devez savoir, les gars, que les règles vous concernent
aussi, car vos mères, sœurs, amies, tantes, cousines, et toutes les femmes de
votre intimité ont leurs règles.
De plus, il
faut savoir que sur terre, un Homme sur deux a ses règles, car un Homme sur
deux est une femme.
Bon, malgré tout ça, il faut
reconnaître que nous, les adolescentes, sommes assez contentes quand nous avons
‘’nos’’ règles pour la première fois, car cela signifie que nous ne sommes plus
des enfants, ni des jeunes filles, mais des femmes ‘’.
INÈS – janvier 2018
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