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lundi 11 octobre 2010

CONCOURIR A UNE DEFINITION DU SARKOZYSME

Salut et fraternité,

Ainsi l'injonction tombe-t-elle d'un peu tous les côtés, des rangs des bons esprits de gauche et, moins étonnamment, des porte-parole de la droite : "Assez d'anti-sarkozysme primaire !". La variante développée au sein du parti socialiste prenant la forme d'une mise en demeure : "l'antisarkozysme ne fait pas une politique", ou encore : "en 2012, pour l'emporter, il ne suffira pas de faire de l'anti-sarkozysme".

On ne contestera évidemment pas qu'il faudra opposer un projet, un programme, une autre vision de la société à ce qu'aura dit, à ce qu'aura fait et à ce qu'aura fait croire depuis dix ans, dans ses fonctions successives, le président sortant.

Ce sera encore mieux d'ailleurs si ce projet, ce programme, cette vision sont authentiquement républicains, authentiquement de gauche, et authentiquement socialistes.

Autrement dit, à la condition que le (la) candidat(e) qui sera appelé(e) à les porter concoure à l'élection présidentielle en inscrivant en tête de ses propositions l'adoption d'institutions nouvelles qui rétablissent  sur nos actes officiels la véracité et la légitimité, perdues depuis cinquante ans, de la mention "République française".

Autrement dit encore, que pour le reste, ses propositions annoncent un temps où l'on pourra de nouveau lire sur le fronton des édifices publics la devise "Liberté, Égalité, Fraternité" comme une exigence assumée et non plus comme un triple mensonge, où se mêlent et se confondent cynisme et dérision - et un temps également où ceux qui auront à mettre en oeuvre une politique de gauche le feront avec une simplicité citoyenne qui surpassera en scrupules civiques, en modestie d'appareil et en austérité de train de vie gouvernemental, les monarchies scandinaves les plus exemplaires en la matière.

Quant à être authentiquement socialiste, la ligne séparative sera sans doute plus discutée ; proposons de retenir comme premier critère de départage celui qu'énonçait Léon Blum : on ne peut pas se dire socialiste si l'on regarde l'ordre des choses comme intangible. Se fixer à cela, c'est déjà prendre une assurance contre toute forme de néo-blairisme, même recoloriée de rose un tant soit peu soutenu, et contre toute autre espèce de reniement annoncé.

Oui, il y a bien un nouvel horizon à opposer à la réaction qu'impulsent  depuis trente-cinq les tenants du tout-marché, de la toute-concurrence et du tout profit et qui emporte, l'une après l'autre, toutes les digues édifiées par le compromis social de la Libération. Économie sociale, économie solidaire, économie démocratique, les thématiques du grand dessein à construire commencent à être perçues, ou pressenties, par des cercles de plus en larges de l'opinion, en opposition à l'argent-roi et au triple dumping planétaire - social, fiscal et environnemental - qui fonde l'économie de la mondialisation capitaliste.

Mais pour essentielle que soit l'affirmation devant le suffrage universel d'un autre espoir et d'une autre ambition de société, reste que les actes, le discours, les modes de pensée, et aussi la personnalité (ne choquons pas certaines délicatesses et disons : le comportement - encore que ce soit là céder à un ménagement sans raison tant "le bonhomme" a donné de motifs qu'on s'intéresse à la première à force d'être révulsés par le second ) de celui qui sera le candidat de la droite en 2012 imposent également à la gauche de pratiquer une dénonciation globale dans la campagne qu'elle lui opposera.

Considérons que cette dénonciation comporte une étape préalable qui est de cerner au plus près la nature du sarkozysme, de caractériser le plus précisément ce qui nourrit sa nocivité  et de réunir les griefs les mieux ciblés afin de dresser le réquisitoire le plus pertinent : c'est ce à quoi on se propose ici de contribuer en lançant, par une sorte  d'appel d'offres, la collecte des définitions applicables au président sortant et à sa politique, et propres ainsi à dessiner avec exactitude et justesse un portrait repoussoir de la présidence finissante.

Et pour ouvrir le bal - ou le feu - et donc en ouverture de cet exercice qu'on espère très largement participatif, on avancera la définition qui est venue à l'esprit de l'auteur de ces lignes ; une citation qui ne prétend à rien d'autre qu'à donner une tonalité de départ, ou qu'on met simplement en avant comme on apporterait une première pierre à une barricade républicaine :
  • le sarkozysme a ceci d'unique qu'il ne manque jamais d'apporter de bonnes réponses à de mauvaises questions.
Faut-il en donner quelques illustrations ?

> Se demander comment ajouter de la persécution à la condition des prostitués qui en est déjà si abondamment pourvue, comment les exposer à un surcroît de dangers et en même temps à un arbitraire policier devenu sans limite, et comment les soumettre davantage encore aux proxénètes, ce sont, bien sûr, autant de très mauvaises questions ;
> mais c'est, sans contestation possible, y apporter une très bonne réponse que d'inventer le délit de "racolage passif", objet pénal non identifié et d'ailleurs non identifiable, qui reléguera les prostituées dans les lieux d'exercice de leur métier les plus périlleux et les plus sordides, et qui fera d'elles à la fois la plus commode variable d'ajustement des indicateurs d'activité policière et la population la plus absolument soumise à une répression discrétionnaire.

> S'interroger sur les moyens de dispenser les plus fortunés, les mieux nantis, les plus pourvus en privilèges, du devoir de participer en raison de leurs facultés à la répartition de la contribution publique entre les citoyens, est évidemment se poser une question illégitime au regard de l'équité et parfaitement condamnable du point de vue civique.
> c'est en revanche lui fournir la réponse la mieux pensée et la plus efficace que d'instituer le "bouclier fiscal" que l'on sait, protection de ces riches dont on nous  a dit qu'ils "n'ont pas à s'excuser" de l'être et qui, au demeurant, ne fait que s'ajouter aux innombrables dispenses de concours à la solidarité et à la protection sociale déjà garanties aux mêmes catégories les plus opulentes.

>  Soupeser, en fonction du besoin médiatique ou de l'intérêt sondagier du moment, le choix de celle des minorités, parmi les plus démunies et les  plus accablées par le sort qui se trouvent sur notre sol, qu'il est le plus profitable de cibler comme porteuse par nature ou par vocation de périls sécuritaires, économiques, sociaux inacceptables pour les "bons Français", n'est rien d'autre, au regard de l'éthique qui s'impose à un état de droit et à une société démocratique, que s'engager dans une spéculation détestable et indigne.
> Mais la solution qu'on y apporte atteint une sorte d'excellence exemplaire quand elle se fixe, en deux tirs rapprochés, sur une dénonciation mélangée des gens du voyage (le prétexte) et des Roms (la cible) : elle réussit en effet, dans le même mouvement, à réveiller les peurs et à agiter les préjugés attachées depuis des siècles aux ''Bohémiens'' - voleurs de poules, voire d'enfants -  et à adresser un message en forme de ''Je vous ai compris" (et malheureusement, cette fois, il s'y trouve peu de double-langage  ...) à toutes les espèces de xénophobies, militantes ou pulsionnelles. Et c'est d'autant mieux joué qu'on s'en prend cette fois à des groupes déjà discriminés de longue date et à des ''métèques'' européens qui vous exposent moins a priori à une incrimination de racisme qu'une persécution ordinaire à l'encontre de Noirs africains ou de maghrébins. 
Excellence exemplaire ? Certes, au moins tant qu'un commis trop appliqué, ou un courtisan trop zélé, dans leur crainte de paraître un tant soit peu en retrait des oukases présidentiels, ne commettent pas l'embardée rédactionnelle qui vaut à leur pays de devenir un objet d'indignation parmi les États convenables, de la vieille Europe aux Amériques ... Ceci au reste ne retirant rien à la valeur théorique de la manoeuvre, puisque aussi bien les politiques les plus habiles ne sont pas à l'abri des faux-pas des serviteurs qui veulent trop bien les servir ...

Bien d'autres exemples, sans doute, seraient susceptibles d'être apportés à l'appui de la définition proposée.

Laissons plutôt la place à celles qui pourront venir s'y ajouter, la compléter ou la contredire. 

L'important est d'armer le réquisitoire qu'il est légitime, nécessaire  et par dessus tout républicain de dresser d'ici à la votation de 2012.

Un dernier mot : a-t-on reproché  un anti-carthaginoisisme primaire à l'auteur du "Delanda Carthago" ?

Martin Avaugour - Denis Kaplan - Jacques Langlade

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